2024.05.23 - Rolling Stone France - Slash: (Not) Lonesome Blues

Slash
(Not) Lonesome Blues

Fort d’une carrière solo de quinze ans, qui ne l’empêche pas d’avoir renoué avec Guns N' Roses, Slash se plaît à explorer de nouveaux territoires musicaux avec son premier album de blues, où l’on retrouve de nombreux invités prestigieux.

Par Mathieu David

Ray-Ban et haut-de-forme solidement vissé sur la tête, Slash, à l’aube de ses 60 ans, sort son... tout premier album de blues, Orgy of the Damned. Une orgie de sons et de solos, présentant un casting ultra-haut de gamme. "J’avais un groupe de reprises de blues à la fin des années 1990, explique-t-il. Certains des musiciens se retrouvent d’ailleurs dans cet album. Ce n’était pas un projet très sérieux. Je voulais que nous enregistrions, mais j’avais d’autres préoccupations à l’époque.”

Loin d’être inactif, Slash s’est donc attelé à la confection de ce disque lors d’une pause entre deux tournées avec Guns N’ Roses : “J’avais ce break de trois semaines, je me suis dit que c’était le moment d’enregistrer, vu que les Conspirators [musiciens de son projet solo, ndla] étaient occupés de leur côté.” Se basant ainsi sur les chansons qu’il reprenait à l’époque, ainsi que poignée d’autres, il se lance donc dans l’enregistrement d’Orgy of the Damned. Qui durera trois semaines.

Pléthore d’invités se retrouve sur cet opus aussi sincère que réjouissant, dans lequel il a pu réunir Billy Gibbons (ZZ Top), Chris Stapleton ou même Brian Johnson (AC/DC). Une équipe gagnante pour rendre un vibrant hommage aux plus grands, mais aussi à ceux qui sont chers au cœur du guitariste. “J’ai moi-même décidé qui chanterait sur quoi et appelé les invités concernés, à l’exception d”Awful Dream’, avec Iggy Pop.” La collaboration avec “l’iguane” s’est faite différemment: “Johnny [Griparic, basse] m’a informé qu’Iggy Pop voulait faire du blues. Je l’ai appelé et lorsque je lui ai demandé quel morceau il souhaitait reprendre, il m’a répondu Sam Hopkins du tac au tac, se souvient-il. Nous l’avons enregistré en acoustique en seulement deux prises. J’en suis particulièrement fier, parce que je sais que c’était important pour lui.”

Pour reprendre “Papa Was a Rolling Stone”, le musicien s’est dirigé vers la chanteuse soul-R’n’B, Demi Lovato. “Dans la version originale, l’histoire est racontée par des voix adultes, ce qui fonctionne pour le côté rétrospectif, mais je voulais la reprendre avec quelqu’un de jeune, pour rendre l’histoire encore plus poignante, reprend le guitariste. J’ai pensé à Demi pour son registre fal-setto et son feeling soul.” Grand sentimental, Slash ne peut s’empêcher de citer ses amis absents : “Ma plus grande déception est de ne pas avoir Lemmy [Kilmister de Motôrhead, décédé en 2015]. J’avais quelques idées et cela aurait fonctionné à merveille”, regrette-t-il.

Toutefois, le musicien ne souhaite pas pour autant être considéré comme un bluesman: “J’écoute pas mal d’artistes blues contemporains, qui en jouent à plein temps et qui font des albums sérieux, poursuit-il. Je ne veux pas marcher sur leurs plates-bandes, ce serait intrusif et ils pourraient mal le prendre! [Rires]” Pourtant il en écoute depuis sa tendre enfance : “Mon père était un mordu de musique et j’ai été exposé très tôt, lorsque je vivais encore en Angleterre, aux Kinks, aux Yardbirds, aux Who et à Moody Blues, se souvient-il. Je me suis mis aux Stones quand nous avons déménagé aux États-Unis, mais tout cela reste très ancré dans le blues. Ma grand-mère m’a aussi fait écouter B.B. King et lorsque j’ai commencé la guitare, le blues britannique m’a énormément influencé.”

Hard-rockeur dans l’âme, il était avide de reprendre les grands standards de tels artistes, mais “plus fort, plus rapidement et de manière plus chaotique". De fait, “Guns N’ Roses est le parfait mélange de tout cela, entre ma vision, celle d’Axl Rose, avec des éléments punk-rock et glam.” Si on ne pense pas au blues à l’écoute de “Welcome to the Jungle”, le rock’n’roll “y trouve ses racines” et cela a poussé Slash à se mettre à la guitare. “Je n’oublierai jamais le moment où j’ai joué ces quatre notes, qui formaient une gamme blues. C’est comme si le ciel s’ouvrait à moi. Cela reste ancré dans la musique que je joue, et pourtant, je n’en ai jamais vraiment fait au sein de mes groupes.”

A SAVOIR

COMPOSITION
Si Orgy of the Damned est un hommage aux grandes figures du genre, le guitariste y a glissé “Metal Chestnut”, un instrumental de son cru. “Nous avions la tête dans les arrangements, que nous devions finir à temps avant que je reparte en tournée. C’est alors que Mike Clink [producteur] me demande si j’ai une compo originale sous la main, comme si j’étais censé en avoir une de prête! J’ai écrit ce morceau en vitesse et je l’ai appris au groupe le lendemain. C’est sorti de manière assez spontanée.”